Sunday, July 30, 2006

le malheur de Cana

La mariée était en noir ce matin à Cana. Sa robe blanche tâchée de sang traînait quelque part entre les corps d’enfant et les mères suppliantes. Elles supplient, on ne sait plus qui, on ne sait plus quoi. Sur cette terre biblique rongée par le malheur des innocents, j’ai encore pensé à cette petite fille. Ce 30 Juillet 2006, elle avait 1 jour et toute la vie devant elle. Mais ce 30 juillet, un avion, un pilote, un viseur, une boule de feu apocalyptique en ont décidé autrement, il fallait qu’elle fût une fois de plus la victime de noces rouges.
Transformer la laideur en beauté, la pauvreté en richesse, l’eau en vin, le malheur en joie…voilà ce que j’ai compris du miracle des noces de Cana. Toi fils de l’homme, as-tu vu ces membres déchiquetés sur l’un des lieux sacrés que compte ce monde. Si tu es là écoute cette prière et prends les enfants de ces femmes éplorées en ton sein, que l’injustice ne soit pas totale, que la cruauté ait une fin.
Je regarde ces morts, mais ma réaction ne sera jamais à la hauteur de l’effroi de cette petite prise entre le bitume et le béton, seule devant la mort, victime de la froideur militaire, victime de la technologie assassine de leurs bombes.
Ces gens étaient pauvres, ces gens étaient démunis, ces gens ne pouvaient pas fuir, ils se sont réfugiés là où il n’auraient pas du être, faut-il les blâmer, faut-il les punir ? Pas un ferry, un peu d’essence aurait suffit à les transporter, un bus, un camion, n’importe quoi. Mais non ! Ce n’importe quoi n’existe même pas pour eux, ils sont pauvres qu’ils en crèvent, ils sont pauvres coupons leurs les ponts, ils sont pauvres bombardons tous ceux d’entre eux qui osent bouger face à l’adversité, face à l’horreur. Les pilotes ont envoyé des tracts, en arabe on remercie leur bonté, mais mauvais calcul, cette petite ne savait pas lire et pour cause ; elle avait un jour, c’est beau une enfant qui a 1 jour, mais c’est beau quand c’est vivant et ça vos bombes douées d’intelligence ne sont pas près de le comprendre.

Marc kaloustian
je suis un juif musulman, je suis chrétien, je ne suis rien. Je suis un homme avec mes peurs, ma lâcheté, ma mauvaise conscience, mon orgueil. je vois cette petite en lambeau, un homme la porte comme un trophé, je pense à ma fille, celle que je n'ai pas eu. Elle joue, une bicyclette que je lui ai offert, elle rie, elle court. cette petite c'est ma fille, sa robe est tâchée de sang, le sang que je n'ai pas versé, mais que j'ai accepté de voir. Une charge et tout part en fumée, la fumée épaisse des jours malheureux. Elle suffoque et je bois, je bois à la santé de ceux qui souffrent, cette souffrance que je fuis de toute mes forces. Cette petite a vécu toute la souffrance que je n'ai pas osée affronter, elle l'a vécu et ne vivra plus jamais. Qu'elle repose en paix au fond de cette terre de sang, le sang de mes ancêtres...